Exsangues sur tous les plans il y a un an encore, les Wallabies australiens ont renversé totalement la situation pour se hisser en finale de Coupe du monde samedi prochain face aux All Blacks, grâce à un cocktail de poigne et de pragmatisme.
+ 2012-2014: DEUX ANNEES DE TURBULENCES
Pour mesurer l’ampleur du redressement entrepris depuis un an, il faut se retourner sur les deux saisons qui ont suivi la Coupe du monde 2011 et se souvenir du champ de ruines apparent qu’était l’environnement des Wallabies à l’automne 2014.
Sans doute le péché originel vient du maintien du sélectionneur Robbie Deans, en poste depuis 2008, à l’issue d’un Mondial-2011 chaotique marqué par une défaite en match de poule face à l’Irlande, puis une sortie sans saveur en demi-finale contre les All Blacks. De plus en plus impopulaire auprès de ses joueurs et du public pour son style de jeu et de management rigide, Deans n’a finalement pas résisté au désastre de la tournée des Lions britanniques et irlandais « Down Under » à l’été 2013.
Successeur de Deans, l’austère Ewen McKenzie n’a guère fait mieux. S’il a entrepris de mettre de l’ordre dans un groupe régulièrement rongé par les frasques de ses vedettes (James O’Connor, Quade Cooper, Kurtley Beale…), il a fini par démissionner écœuré à la fin du Four nations 2014, après qu’on lui eut prêté une relation extra-conjugale avec une dirigeante de la Fédération.
Entre la fin de la Coupe du monde 2011 et la démission de McKenzie, les résultats n’ont guère apporté de baume au coeur: 21 victoires seulement en 40 matches, un bilan loin des standards habituels australiens.
+ POIGNE ET PRAGMATISME
Nommé en catastrophe pour les tests de novembre 2014 en Europe, Michael Cheika a d’abord composé avec les moyens du bord, ne remportant qu’un match pour trois défaites.
Mais il a ensuite imposé sa patte mêlant poigne et pragmatisme, comme avec les Waratahs de Sydney avec lesquels il a ravi le titre du Super 15 en 2014. D’abord dans la vie de groupe, sifflant la fin de la récréation et recréant une cohésion autour de l’expérimenté capitaine Stephen Moore. « Les choses changent car les joueurs l’ont voulu. Ce que je sais c’est que les gars jouent les uns pour les autres, ils veulent porter ce maillot et ils se sont investis quand ils sont sur le terrain », a expliqué Cheika dimanche. « Les grands mots d’ordre sont d’être honnêtes les uns avec les autres, faire du mieux que l’on peut et donner le meilleur de soi-même, ne pas seulement parler de ce qu’on veut faire mais le faire, mériter le respect des autres. »
Dans le jeu, l’ancien N.8 a imposé son style direct et physique. En même temps, il a su s’adjoindre les talents créatifs de Stephen Larkham, ouvreur légendaire aux 102 sélections, désormais au chevet de l’attaque. Autre bonne pioche, le recrutement en janvier de l’Argentin Mario Ledesma pour soigner la conquête, notamment la mêlée, traditionnel point faible des Wallabies. Cet alliage de compétences a nettement amélioré le rugby australien, mêlant vitesse, habileté technique et solidité sur les fondamentaux.
+ DES JOUEURS AU RENDEZ-VOUS
Ce pragmatisme s’est aussi matérialisé en coulisses puisque la Fédération (ARU), dos au mur, a assoupli ses règles de sélection pour faire revenir les cadres partis à Toulon, le centre Matt Giteau (32 ans) et l’ailier Drew Mitchell (31 ans). Et elle a verrouillé ses meilleurs éléments par de juteux contrats, comme l’arrière Israel Folau ou le troisième ligne David Pocock. L’ARU a même élaboré un accord sur mesure pour son prometteur ouvreur Bernard Foley, lui permettant d’effectuer une lucrative pige au Japon.
Bien vu, puisque ce sont ces joueurs qui portent actuellement les Wallabies dans cette Coupe du monde, dans le sillage d’un été réussi. Depuis début juillet, les Wallabies n’ont perdu qu’un match, face à la Nouvelle-Zélande à Auckland (41-17), pour dix victoires, dont des succès face aux All Blacks, l’Afrique du Sud, l’Argentine, l’Angleterre et le pays de Galles. Et sa série de sept victoires d’affilée est loin d’être anodine: pour retrouver trace d’un tel élan, il faut remonter à 1999. Année du dernier titre de champion du monde des Wallabies.
©AFP
Discussion à ce sujet post