Les hommes politiques australiens investissent des sommes importantes pour honorer la mémoire des soldats morts au combat — particulièrement ceux des première et seconde guerres mondiales — et pour trouver, identifier et enterrer de nouveau les corps qui peuvent être rendus par la terre de nombreuses décennies plus tard.
Il est donc surprenant de trouver le crâne d’un soldat australien de la première guerre mondiale, présentant d’impressionnantes blessures au visage — qui l’ont tué il y a très exactement un siècle cette semaine — exposé sur le site en ligne d’un musée médical américain.
Une histoire bouleversante et tragique
Ce crâne, qui fait partie d’une collection du Mütter Museum de Philadelphie, raconte une histoire tragique et bouleversante de violence sur le champ de bataille et de souffrance physique insoutenable, que les commémorations officielles omettent trop souvent. Le 28 septembre 1917, le soldat a été blessé à la bouche durant la bataille du bois de Polygone en Belgique ; sa mâchoire droite a été détruite par des éclats d’obus tandis qu’une autre balle — toujours visible dans le crâne — a atteint son sinus gauche.
Le chirurgien ophtalmologue de Philadelphie, WT Shoemaker, a soigné cet homme dans un hôpital de campagne en France. Le soldat a survécu à ses blessures initiales et à ses traitements. Mais cinq jours plus tard, aveugle et désorienté, il a retiré les bandages qui maintenaient ses plaies. Il est mort d’hémorragie.
Le Dr Shoemaker a donné ce « crâne adulte avec traumatisme par balle » au musée en 1917.
Ce crâne raconte évidemment l’histoire terrible d’un mort sur le champ de bataille. Mais nous savons malheureusement bien peu de choses de cet homme. Nous ne connaissons ni son identité, ni sa famille, ni ses origines. Etait-il indigène ou blanc ?
Pouvait-il imaginer qu’un jour son crâne deviendrait une pièce de musée et un objet de curiosité ?
Si le musée Mütter possède les réponses à ces questions, il n’en révèle rien. Malgré des demandes répétées, il n’a pas précisé comment : il est entré en possession de ce crâne australien ; si le reste du corps est également au musée ou s’il est enterré dans un cimetière militaire ; si le musée connaît l’identité de ce mort.
« Connu de Dieu seul »
Il est en réalité probable que le reste du corps soit enterré à proximité du champ de bataille. Au cours des dix dernières années, les corps de plusieurs soldats australiens morts au combat autour du bois de Polygone ont été découverts dans des propriétés locales. Quelques-uns ont été identifiés grâce à des techniques ADN. Tous ont été de nouveau inhumés avec une pierre tombale portant l’inscription « Connu de Dieu seul », ou leur identité retrouvée.
Les quatrième et cinquième divisions de l’Australian Imperial Force ont perdu plus de 5 700 hommes lors de la bataille du bois du Polygone, qui a commencé le 26 septembre 1917.
Issus d’une population de moins de 5 millions d’individus en 1914, 324 000 Australiens se sont engagés et ont servi à l’étranger, et 61 720 sont morts. La plupart ont été inhumés dans des tombes militaires officielles près des champs de bataille ou des hôpitaux de campagne où ils sont morts. Mais malheureusement, 18 000 tués sur le front de l’Europe de l’Ouest n’ont jamais été retrouvés, ou leur corps n’a pas été identifié.
Le soldat dont le crâne est exposé par le musée Mütter doit avoir été classé parmi les disparus alors même que le musée pourrait être en mesure d’aider à l’identifier, grâce aux rapports médicaux et personnels relatifs à son traitement sur le champ de bataille.
En attendant, la présentation de ce crâne est une anomalie au regard de la position officielle australienne qui consiste à retirer de l’exposition publique les restes humains (issus pour une grosse majorité des peuples aborigènes et insulaires du détroit de Torres) qui se trouvent en possession de musées ou d’écoles de médecine étrangers ; et à les rapatrier.
Une réponse officielle des autorités australiennes
Après que le Guardian ait révélé la présence de ce crâne dans la collection, les autorités australiennes ont réagi promptement en demandant à ce que celui-ci soit retiré de l’exposition. Des historiens de guerre et des chercheurs des quatre coins du monde se sont précipités pour identifier, à partir des rapports militaires, le soldat sur lequel ce crâne a été prélevé. Pour en apprendre davantage, lisez cet autre article (en français seulement).
Glossaire
au regard de (exp.) : considering
champ de bataille (n.) : battlefield
chirurgien (n.m.) : surgeon
connu de Dieu seul (exp.) : known unto God
crâne (n.m.) : skull
éclats d’obus (n.) : schrapnel
enterrer (v.) : to bury
être en mesure de (exp.v.) : to be in position to
inhumer (v.) : to bury
mort au combat (exp) : battlefield dead
omettre (v.) : to overlook
pierre tombale (n.) : headstone
plaie (n.f.) : wound
s’engager (v.refl.) : to enlist
tombe (n.f.) : grave
Revelations and mysteries of an Anzac skull displayed in an american museum
Australian politicians invest significantly in commemorating the battlefield dead and into finding, identifying and reburying those whose bodies the mud may surrender many decades later.
So it is surprising to find the skull of a first world war Australian Anzac soldier, replete with the shocking facial injuries that killed him a century ago this week, featured online in an American medical museum’s collection.
A shocking and tragic story
The skull, part of the collection of the Mütter Museum in Philadelphia, tells a shocking and tragic story of battlefield violence and intolerable physical suffering that official commemoration all too often overlooks.
On 28 September 1917, the Anzac was shot in the mouth during the Battle of Polygon Wood in Belgium, and his right jaw destroyed by shrapnel while another bullet – still visible in his skull – struck his left sinus.
Philadelphia ophthalmologist and surgeon WT Shoemaker treated this soldier at a battlefield hospital in France. This soldier survived his initial injuries and treatments. But, five days after his injuries, blind and disoriented, he pulled out the bandage materials that packed the wounds. He bled to death.
It says Shoemaker donated the “Adult skull with ballistic trauma” to the museum in 1917.
The Anzac skull certainly tells a story of a terrible battlefield death. But unfortunately, we know precious little about who this Anzac is. We don’t have his name or know who his family is or where he came from. Was he Indigenous or white?
Could he ever have imagined that his head would become a museum collection item and an object of popular curiosity?
If the Mütter Museum knows any of this, it is not letting on. Despite repeated requests, the museum has not detailed how: it acquired the Australian’s head; whether the rest of his body is in the museum or buried in a war cemetery; if the museum is privy to the dead man’s identity.
“Kown unto God”
It is, in fact, likely that the rest of the body is buried in the vicinity of the battlefield. In the past decade the bodies of several Anzacs who died in fighting around Polygon Wood have been unearthed on local properties. Several have been identified using DNA techniques. All have been officially re-buried with either “known unto God” headstones or memorials bearing their re-established identities.
The fourth and fifth divisions of the Australian Imperial Force suffered more than 5,700 casualties at the Battle of Polygon Wood, which began on 26 September 1917.
From a population of less than 5 million in 1914, some 324,000 Australians enlisted and served overseas, and 61,720 died. Most are buried in official war graves close to the battlefields or field hospitals where they died. But tragically some 18,000 who died on the European western front were either never found or could not be identified at death.
The Anzac whose skull is displayed by Mütter would be ranked with the missing even though the museum might well be in a position to help name him due to the medical and personnel records that would have formed part of his battlefield treatment.
Meanwhile, the display of the skull is anomalous with official Australian policies to remove from public display and repatriate human remains (overwhelmingly belonging to Aboriginal and Torres Strait Islander ancestors) that are held by foreign museums and medical schools.
The official response of Australian authorities
After the Guardian reported the skull was on display, the Australian authorities have intervened swiftly to have it removed from public view. Military historians and researchers from around the world raced to identify, through military records, who the skull belonged to.
To learn more about what they found, read this other article (in French only).
Source : the guardian.com
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