Trop peu connue, et pourtant fascinante, la notion du « Temps du Rêve » correspond au temps de la création du monde tel que nous le connaissons pour les Aborigènes. Relief, plantes, fleuves, auraient été créés par de grands ancêtres avec lesquels il serait toujours possible de communiquer…
L’origine du monde
Pour les Aborigènes, la Terre était autrefois une masse informe, dénuée de couleur, de son et de lois. De cette Terre seraient sortis des Etres surnaturels – les grands ancêtres -, prenant la forme d’animaux, de végétaux, d’humains et même d’éléments naturels tels que la pluie. Certains ancêtres étaient d’ailleurs hybrides, mi-homme mi-rocher par exemple. Ces Etres auraient parcouru le monde plat et terne en chantant et auraient créé le paysage par leurs multiples mouvements. Leurs disputes, leurs amours, leurs explorations auraient créé les dunes, les montagnes, les rivières, les animaux et même les êtres humains. Épuisés de leurs pérégrinations, ils seraient retournés d’où ils venaient pour un repos sous la surface de la Terre. Certains esprits se seraient réfugiés dans des rochers ou des paysages particuliers, rendant l’endroit sacré. Quoi qu’il en soit, leurs aventures seraient au fondement du savoir, des lois, des coutumes, des cérémonies, des danses et des chants aborigènes.
Un espace temps en parallèle au nôtre
Le « Temps du Rêve » ne fait pas partie du passé pour les Aborigènes, mais reste d’actualité. C’est l’une des raisons pour lesquelles la notion de « Temps du Rêve » est relativement compliquée à saisir pour un occidental. Alors que nous considérons le temps comme linéaire (on parle de passé, de présent puis de futur), le temps pour les Aborigènes est un : ils peuvent se reconnecter avec ces esprits, communiquer avec eux, et permettre au monde de subsister. Comment ? En se rendant dans un lieu sacré, à travers la peinture et les chants, les Aborigènes décrivent l’histoire et les itinéraires empruntés par leurs ancêtres. C’est un moment de connexion avec ces derniers et de transmission du savoir. Ainsi, lorsqu’un Aborigène naît quelque part, il va être sur le lieu de passage d’un ou de plusieurs ancêtres. Il va alors raconter comment tel ancêtre a créé un trou d’eau par exemple ou encore les dunes de sable; comment cet univers a été créé et recréé. En peignant ou lors des cérémonies, un Aborigène réactualise donc l’acte initial de son ancêtre pour créer le territoire ; ce faisant, il lui permet de continuer à vivre, le temps sacré nourrissant le présent. C’est cette répétition de l’acte originel qui entretiendrait la vie, et assurerait l’équilibre entre l’Homme et son environnement. Les Aborigènes sont persuadés que si ils arrêtaient de peindre, de chanter ou d’organiser des cérémonies, le monde dépérirait et s’éteindrait.
Un exemple de création de paysage pendant le « Temps du Rêve » : Uluru
Uluru, ce fameux rocher rouge au milieu du désert, fait lui aussi l’objet d’une histoire – d’un « Rêve » pour les Aborigènes. Un boomerang serait à l’origine du rocher sacré, illustrant de la force symbolique de la culture aborigène : un homme-lézard se serait en effet amusé à lancer son boomerang le plus loin possible. Un jour, s’étant donné le défi de le lancer encore plus loin, ce dernier ne lui serait pas revenu. L’homme-lézard serait donc parti à sa recherche, au nord d’abord, sans rien trouver, puis aurait bifurqué vers le sud. Il l’aurait finalement retrouvé, tellement enseveli par le vent et le sable qu’il aurait formé un immense rocher rouge au milieu du désert. Incapable de le récupérer, l’homme lézard aurait donc laissé Uluru, désormais connu dans le monde entier.
A l’origine du monde mais toujours présent, traçant un itinéraire spirituel et poétique aux quatre coins de l’Australie, le « Temps du Rêve » dissimule encore de nombreux mystères à travers les plus belles toiles aborigènes.
Elise Mesnard
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