Chaque année, de plus en plus de Français prennent leur billet pour l’Australian dream. Le dépaysement, les plages, les roadtrips, le niveau de vie, la folie des grandeurs… Autant de raisons qui les poussent à venir sillonner l’Océanie. D’autres quant à eux débarquent avec d’autres rêves… en pépites.
On dit souvent qu’il y autant de façons de voyager que de voyageurs. Etienne Leteurtre, alias Moicameleon sur la toile, a quant à lui frayé son propre chemin, sortant du sentier battu des backpackers. C’est fin 2017, que le jeune marseillais s’envole vers l’El Dorado des Français avec un projet atypique dans un coin de la tête : devenir chercheur d’or. « Au début, parcours assez classique, j’avais envie de profiter de ma jeunesse pour faire un working holiday visa. Le plan de départ c’était d’aller à Sydney pour faire du marketing, puisque j’ai fait mes études là-dedans. », raconte Etienne. Après son arrivée sur la terre promise, le voyageur passe près d’un mois dans la plus grande ville d’Australie mais n’y trouve pas son bonheur. « De là je me suis dit que j’allais simplement vivre un rêve que j’ai toujours voulu réaliser : aller chercher de l’or dans le Western Australia. »
Cette passion lui vient il y a quelques années, alors qu’il découvre le TV show « Australie, la ruée vers l’or » sur RMC. De la fiction, Etienne passe à la réalité. Une fois sa décision prise, tout s’enchaîne rapidement. « J’ai pris mon billet d’avion pour Perth et j’ai acheté un 4×4. Et tout chercheur d’or qui se respecte va à Kalgoorlie pour commencer sa quête, donc je suis allé là-bas, j’y ai acheté le détecteur à métaux et je me suis rendu au Département des mines. Ils y donnent toutes les informations et expliquent tout. » Néanmoins, n’est pas chercheur d’or qui veut. Pour pouvoir prospecter en toute légalité, la licence appelée « Miner’s right » est obligatoire et coûte 25 dollars australien. Il est également bon à savoir que la quête d’or peut se faire uniquement au sein des zones publiques. Pour ce faire, le gouvernement a notamment développé l’application Tengraph permettant de repérer les endroits où la prospection est autorisée.
Du rêve à la réalité
Une fois les questions pratiques et administratives réglées, Etienne part enfin à l’aventure. Pendant près de trois mois et demi, il écume plusieurs terrains du Western Australia. Sur la route, il est d’ailleurs rejoint par un autre Français puis plus tard par un Australien. « Il existe un forum français de détection et quand tu t’arrêtes du côté de Leonora, il n’y a quasiment que des prospecteurs là-bas donc c’est facile de faire des rencontres. » Avide de partager sa passion, le Marseillais conte ses aventures et écrit plusieurs articles sur son blog à propos de sa ruée vers l’or. Il crée même un guide complet pour celles et ceux qui voudraient se lancer.
Au fil de ses recherches, sans être une réelle désillusion, ce rêve qu’il a pu réaliser ne lui a pas apporté la fortune que l’on pourrait espérer. « C’est toi et ta chance. J’ai trouvé 62,8 grammes, mais sur trois mois et demi, ce n’est pas du tout rentable. Entre l’achat de la voiture et du matériel, la perte à la revente, le ravitaillement à Leonora… Non je ne suis pas devenu riche », assure-t-il avec bonne humeur. Plus qu’une quête d’argent, la prospection est avant tout une passion pour la majorité des chercheurs d’or. « La plupart des prospecteurs sont à la retraite et ils font plus ça pour le plaisir et l’envie de découvrir une grosse pépite que pour le pognon. »
Outre les recherches parfois infructueuses, la prospection n’est pas toujours une partie de plaisir que ce soit pour le corps ou l’esprit. « Quand tu fais ça du matin au soir pendant 12h, c’est assez crevant. Il y a le poids du détecteur à métaux que tu balances à bout de bras de gauche à droite avec la grosse batterie que tu portes sur le dos… À la fin de la journée t’es lessivé, surtout quand tu dors dans une voiture sur une planche en bois. Mais c’est l’aventure aussi », sourit le jeune français. Pour devenir prospecteur, s’armer de persévérance est essentiel pour lui. « J’avais essayé de former un couple, mais ils ont vite abandonné. De mon côté ça m’est déjà arrivé de rester dix jours sans rien trouver, on ressent vite un coup de blues. Mais l’or finit toujours par tomber. Il faut y croire un minimum tout en gardant les pieds sur terre.»
Les dangers de la prospection
La prospection a également son lot de risques. Être seul au milieu de nulle part peut en faire rêver plus d’un, mais un minimum de sécurité est de rigueur. « Il faut au moins avec une balise GPS de secours, et une carte hors ligne sur son téléphone », avertit Etienne. Qui plus est, les mauvaises rencontres ne sont pas rares, même dans l’immense désert. « Il y avait ce fameux Australien avec qui j’ai prospecté un temps qui était resté sur un terrain alors qu’on était reparti avec l’autre Français. En fait les terrains publics le sont en grande majorité le temps que le département traite les demandes de privatisation. On était donc sur une zone en traitement. Le jour après notre départ, le propriétaire de la demande est arrivé et il se trouve que c’était le membre d’un gang australien assez connu. Ils ont essayé d’intimider le prospecteur avec qui j’avais voyagé à coups de fusil à pompe, tirs en l’air… En fin de compte le vrai danger dans le bush ce sont les hommes, pas les animaux comme on peut le penser. »
Quant à ses propres péripéties, Etienne s’amuse en se remémorant une rencontre avec deux émeus qui l’ont poursuivi jusqu’à ce qu’il se cache derrière un arbre. « Je n’étais vraiment pas serein cette fois-là. » Des anecdotes qui n’ont pourtant pas entamé son désir de revenir. « Depuis que je suis revenu en France, il n’y a pas un jour où je n’ai pas envie d’y retourner. » Au-delà de sa ruée vers l’or, Etienne a aussi la nostalgie de ses soirées dans le désert. « C’est assez magique quand t’es tout seul au milieu du bush, au calme, avec un ciel magnifique. Finalement mes meilleurs moments c’était ça : les couchers de soleil et la nuit avec le ciel étoilé. »
Après avoir cherché de l’or, Etienne veut aujourd’hui viser les étoiles. « J’ai repris des études dans le génie mécanique et j’ai pour projet de travailler dans le domaine spatial, d’aller dans l’espace », affirme-t-il. Malgré tout, l’Australie et sa ruée vers l’or restent dans un coin de son cœur. « Au premier problème ici, je refais mes valises ! »
Photos : Etienne Leteurtre
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