Alep (Syrie) (AFP) – La trêve « humanitaire » décrétée par Moscou à Alep est entrée en vigueur jeudi, mais des combats ont aussitôt éclaté dans un des couloirs censés s’ouvrir pour évacuer les civils et les rebelles qui le souhaitent.
Des affrontements et des tirs d’artillerie ont éclaté dans un couloir établi près du quartier de Boustane al-Qasr contrôlé par les rebelles, a constaté un journaliste de l’AFP, peu après l’entrée en vigueur de la « pause humanitaire », qui a débuté à 08H00 (05H00 GMT).
Huit couloirs humanitaires, dont six pour l’évacuation de civils, de malades et de blessés, et deux pour le retrait de rebelles armés, mais qui peuvent également être utilisés pour les civils, ont été mis en place, avait annoncé mercredi l’état major russe.
Un photographe de l’AFP a confirmé avoir entendu ces tirs près du passage de Boustane al-Qasr, qui relie zone rebelle et zone tenue par le gouvernement, tandis que l’agence officielle Sana a accusé « des groupes terroristes » d’être responsables des tirs.
Dans des messages diffusés par des hauts-parleurs, l’armée syrienne appelait toutefois les habitants des quartiers-est à « saisir la chance » qui leur était offerte pour évacuer « les blessés », rappelant que la trêve durerait trois jours, chaque jour de 8h00 jusqu’à 16h00, selon le photographe de l’AFP.
Depuis deux jours, le régime du président Bachar al-Assad et son allié russe ont suspendu leurs raids aériens visant les quartiers Est d’Alep, où vivent quelque 250.000 personnes.
-‘Risquer ma vie’-
Si des habitants des zones rebelles interrogés par le correspondant de l’AFP ont exprimé le souhait de partir, ils restent pour le moins sceptiques face à cette annonce de trêve « humanitaire ».
« Même si j’ai besoin de sortir d’ici, à cause de la détérioration des conditions de vie avec le siège et le manque de nourriture et de travail, je ne vais pas risquer ma vie et celle de ma famille et être le premier à emprunter ces passages », a indiqué à l’AFP Mohamed Shayah, au chômage et père de quatre enfants.
Moscou avait annoncé mercredi que la trêve durerait 11 heures, et non huit comme annoncé initialement.Toutefois, dans la soirée, l’armée syrienne a affirmé que celle-ci durerait trois jours.
Après des entretiens à Berlin avec les dirigeants français et allemand, le président russe Vladimir Poutine s’est dit prêt à prolonger « autant que possible » l’arrêt des frappes aériennes.
L’ONU a toutefois estimé mercredi que les équipes chargées d’acheminer de l’aide dans Alep avaient besoin « d’au minimum 48 heures » de pause dans les combats, selon Jens Laerke, porte-parole d’OCHA (bureau des Nations unies pour l’aide humanitaire).
Depuis plusieurs semaines, Moscou fait l’objet de critiques virulentes sur la scène internationale, les Occidentaux dénonçant des « crimes de guerre » au moment où les bombardements d’une extrême violence, lancés le 22 septembre, ont tué des centaines de civils et détruit des infrastructures civiles, notamment des hôpitaux.
Le régime syrien et son allié russe affirment toutefois bombarder les quartiers est pour éliminer les « terroristes », principalement les jihadistes du Front Fateh al-Cham (ex-Front al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda).
– Symbole de la guerre –
Ancienne capitale économique de Syrie, Alep est devenue l’un des symboles de la guerre qui déchire la Syrie depuis mars 2011.La métropole est divisée depuis 2012 entre un secteur ouest progouvernemental et un secteur est tenu par les insurgés.
Situés essentiellement près des écoles et des mosquées, les points d’entrée des couloirs humanitaires d’évacuation de la ville seront surveillés par des drones, selon l’état major de l’armée russe.
Neuf autocars et sept ambulances seront dépêchés vers les couloirs humanitaires dans le nord de la ville et huit autocars et huit ambulances seront déployés dans le sud, selon la même source, ajoutant que deux autres autocars et huit ambulances seront en réserve.
Des employés de la mission de l’ONU et des volontaires du Croissant rouge syrien vont aider à l’évacuation des civils et les accompagner durant tout le trajet après le départ d’Alep, selon l’armée russe.
Le déroulement de l’évacuation sera diffusé en temps réel sur le site du ministère russe de la Défense grâce à des caméras de vidéosurveillance installées près des couloirs humanitaires, selon Moscou.
« Nous n’avons que faire de l’initiative russe, ils ont violé toutes les initiatives précédentes, et nous ne leur faisons aucunement confiance », a indiqué à l’AFP Yasser al-Youssef un responsable de l’influent groupe rebelle d’Alep, Noureddine al-Zinki.
« Qui sont-ils pour décider de déplacer le peuple syrien qui s’est révolté contre le dictateur Assad ». »Nous ne renoncerons pas à notre droit à défendre notre peuple et à nous défendre nous-mêmes devant la machine à tuer des Russes et du régime », s’est interrogé Yasser.
Source: AFP
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